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Quand la science fait remarcher les paraplégiquesL’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) a développé un essai clinique sur les paraplégiques et la moelle épinière, dont a bénéficié Michel Roccati, l’un des trois premiers patients opérés. Pas à pas, s’approche ce qui relevait du miracle il y a quelques décennies: permettre à des personnes devenues paraplégiques suite à une lésion de la moelle épinière, de sortir de leur fauteuil roulant pour retrouver les joies de la marche autonome…En Suisse, une équipe dirigée par Grégoire Courtine, neuroscientifique à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), et Jocelyne Bloch, neurochirurgienne au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), décrit dans la revue Nature Medicine comment trois patients atteints d’une lésion complète de la moelle sont devenus capables de marcher, nager, se tenir debout et contrôler leur tronc, grâce à 16 électrodes implantées en arrière de la moelle épinière, au contact de la méninge, pour envoyer sur demande des impulsions électriques faisant se contracter les muscles.Là ne réside pas la première: développée à la fin des années 1960 pour traiter la douleur neuropathique, la stimulation électrique épidurale a tôt montré ses capacités à restaurer une activité musculaire. D’abord par hasard: en 1973, une équipe américaine rapporte une amélioration du contrôle des membres et de la position assise chez une patiente partiellement paralysée à cause d’une sclérose en plaques et implantée pour traiter des douleurs chroniques. D’autres observations suivent, mais «la capacité de la stimulation électrique de la moelle épinière à améliorer la fonction motrice après une paralysie n’a pas été immédiatement comprise», notaient en octobre des auteurs américains dans Bioelectronic Medicine .Un retour de la marche «en une heure»En 2018, plusieurs équipes (deux aux États-Unis, puis celle de Lausanne) avaient fait remarcher, après plusieurs mois d’entraînement intensif, des personnes atteintes d’une lésion totale ou complète de la moelle épinière. Mais Grégoire Courtine et Jocelyne Bloch poussent la prouesse encore un peu plus loin en permettant un retour de la marche «en une heure» après le début de la stimulation, chez des lésés médullaires complets…Leur secret: plutôt que de détourner des palettes d’électrodes conçues pour traiter la douleur, les chercheurs ont développé avec la société Onward un réseau d’électrodes «précisément positionnées pour cibler les bonnes structures nerveuses, pour activer les muscles du tronc et des jambes, indique Grégoire Courtine. Le champ d’électrodes est plus long et plus large, ce qui nous permet d’être très spécifiques dans la stimulation d’un muscle», sans stimuler involontairement son «jumeau» latéral.Une IRM réalisée avant l’opération, puis des tests au décours de la chirurgie, permet d’adapter le plus exactement possible le positionnement des électrodes à la morphologie du patient, et les chercheurs ambitionnent de constituer une «bibliothèque» de champs d’électrodes, pour que le chirurgien puisse choisir la plus adaptée à son patient.Un large essai clinique aux États-UnisLes électrodes envoient des impulsions sur l’ordre d’un pacemaker implanté dans l’abdomen. Il est piloté via une antenne placée à la ceinture, par une tablette équipée de programmes reproduisant des schémas d’activation musculaire qui permettent la marche, la nage, le vélo, etc. Michel Roccati, l’un des trois premiers patients opérés, est désormais capable de se tenir debout pendant plus de deux heures, de marcher un kilomètre sans s’arrêter, et même… de monter des marches!Neuf patients au total sont passés entre les mains de Jocelyne Bloch et un large essai clinique doit être mené aux États-Unis pour valider l’efficacité de la technologie. «La FDA (autorité régulatrice américaine, NDLR) nous a accordé un statut d’innovation de rupture, ce qui signifie que si les essais cliniques fonctionnent, la technologie sera prise en charge», se réjouit Grégoire Courtine.Un système complexe à utiliserMais tout n’est pas encore gagné. La marche est une symphonie complexe, et «la difficulté qu’ont toutes les équipes est de gérer l’équilibre, explique le Pr Stephan Chabardès, chef du service de neurochirurgie du CHU de Grenoble et directeur médical du centre de recherche biomédicale Clinatec, qui collabore avec l’EPFL. La marche, c’est une succession de périodes instables, rendue possible par le retour d’informations qui permet au cerveau de savoir à tout moment où se situe le pied, si le genou est fléchi, etc.» Certains patients de l’EPFL disent avoir quelques sensations lorsque la stimulation est enclenchée (sentir le sol sous leur pied ou la contraction d’un muscle…), mais pas assez pour s’affranchir d’un déambulateur. (…)L’équipe de Lausanne va aussi s’atteler à traiter des patients plus précocement. «Pour être inclus dans cette étude, la lésion médullaire devait avoir plus d’un an, car nous voulions être sûrs qu’elle était stabilisée et que les patients avaient atteint un plateau dans la récupération», a précisé Jocelyne Bloch lors d’une conférence de presse. Mais tout laisse à penser qu’agir plus tôt améliorerait l’efficacité du dispositif. «Nous l’avons prouvé chez l’animal.»Quant à véritablement guérir la paraplégie, cela reste pour le moment un mirage. Dans Advanced Science , une équipe israélienne explique avoir réparé la moelle de souris avec des neurones dérivés de cellules souches pluripotentes induites. «Régénérer la moelle, cela fait des années que ça marche chez le rat, mais on n’y arrive pas chez l’homme», nuance le Pr Chabardès. La neurostimulation par électrodes laisse en revanche entrevoir un espoir: traités très précocement, des patients atteints de lésions incomplètes pourraient avoir une véritable récupération fonctionnelle, leur permettant de marcher à nouveau sans le support d’une stimulation électrique…Source : https://www.lefigaro.fr/sciences/quand-la-science-fait-remarcher-les-paraplegiques-20220207
Un nouvel implant fait remarcher trois paraplégiques en moins d'un mois07.02.2022 Trois nouveaux patients paralysés des jambes et du tronc inférieur bénéficient avec succès de la stimulation électrique de leur moelle épinière pour remarcher, faire du vélo, nager... Grâce à de nouvelles électrodes, les équipes du CHU Vaudois et de l'EPFL confirment les espoirs fous placés dans cette neurotechnologie.Un nouvel implant fait remarcher les paraplégiquesTrois nouveaux patients paraplégiques ont retrouvé l’usage de leurs jambes grâce à la stimulation électrique de leur moelle épinière. Complètement paralysés de la partie inférieure du tronc et des jambes depuis des années, il leur a suffi de moins d’un mois après l’intervention chirurgicale pour se tenir debout, marcher, faire du vélo, nager et contrôler les mouvements du tronc… Avec l’annonce de cette nouvelle prouesse, les équipes suisses de la neurochirurgienne Jocelyne Bloch au CHU Vaudois et Grégoire Courtine à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) transforment l’essai publié trois ans plus tôt, en octobre 2018, qui avait déjà conduit trois paralytiques à recouvrer l’usage de leurs jambes au prix d’une rééducation intense."Les tout premiers pas ont été vraiment incroyables, inespérés !"Cette nouvelle étude publiée dans Nature Medicine confirme tout le potentiel de cette neurotechnologie. Elle consiste à disposer des électrodes au millimètre près sur la moelle épinière, au niveau de la lésion, chacune située près des racines nerveuses des jambes et du tronc. Connectées à un neurostimulateur implanté dans l’abdomen, les électrodes s’activent selon des programmes d’aide aux mouvements (lever, baisser la jambe gauche ou droite). L’activité électrique délivrée stimule ainsi les zones où subsistent des cellules nerveuses fonctionnelles pour que le courant se remette à circuler."Lorsque j’ai pu sentir à nouveaux mes membres, quelques jours seulement après l’intervention chirurgicale, c’était vraiment très émouvant", témoigne Michel Roccati, trentenaire devenu paraplégique à la suite d’un accident de moto en 2017. C’est lui qui contacte l’équipe de Grégoire Courtine et Jocelyne Bloch après leur annonce retentissante de 2018, avec l’espoir d’intégrer la suite de leurs essais. Chose faite dès l’été 2020 au cours duquel les électrodes et le neurostimulateur sont installés. "Les tout premiers pas ont été vraiment incroyables, inespérés ! se remémore Michel Roccati. Je m’entraîne énormément depuis plusieurs mois. Je fixe mes objectifs. Je peux même monter et descendre des escaliers. Je pense pouvoir franchir 1 km d’ici le printemps." Mieux encore, lui et les deux autres personnes sont même en mesure de se tenir debout ou de réaliser des mouvements sans la stimulation électrique. "Ils sont moins endurants bien sûr, précise Grégoire Courtine, mais c’est un grand motif de satisfaction, car cela signifie que la stimulation est capable de restaurer en partie les fonctions motrices au-delà de l'activation électrique temporaire."Un nouvel implant plus efficaceLa nouveauté cette fois réside dans le type d’implant utilisé. Un "patch" d’électrodes plus long et plus large d'environ 7 cm de long pour 1,5 cm de large, permettant de couvrir plus de surface sur la moelle épinière. "Avec des électrodes disposées de manière à les faire correspondre précisément aux racines nerveuses qui nous permettent d’accéder aux neurones qui contrôlent les muscles", précise Jocelyne Bloch.Autre innovation : les schémas d’activation ont été personnalisés pour chaque patient traité et pour différents types de mouvements. C’est ce qui a permis cette fois une récupération des mouvements moteurs quelques heures seulement après l’activation de l’implant. "Les nouveaux implants souples que nous plaçons sous les vertèbres au contact de la moelle épinière sont capables de moduler les neurones qui régulent l’activité de groupes musculaires précis. On peut ainsi activer la moelle épinière comme le cerveau le ferait naturellement", développe Grégoire Courtine.L’équipe démontre ainsi que ses algorithmes de stimulation personnalisés s’avèrent plus précis et efficaces, avec une plus grande diversité d’activités motrices, le tout sur des lésions de la moelle plus sévères. Concrètement, le patient commande son implant grâce à deux petites télécommandes fixées à son déambulateur. Les stimulations électriques spécifiques à l'activité souhaitée (se lever, marcher, pédaler, etc.) sont sélectionnées sur une tablette sans fil, et générées par le pacemaker implanté dans l’abdomen. Si les mouvements ont été possibles dès la première séance, des mois d'entraînements quotidiens restent nécessaires pour faire progresser la mobilité. Les trois patients présentés dans cet essai ont pu utiliser le dispositif en dehors des salles de rééducation pour s'offrir des séances de marche dans Lausanne ou pour boire un verre debout avec des amis. "Bien sûr, nous n'en sommes pas encore au stade où ils seraient pleinement autonomes pour se lever le matin par exemple après avoir attrapé leur tablette sur leur table de chevet, mais c'est une perspective bien réelle désormais", explique Grégoire Courtine qui imagine déjà ses patients équipés de montres intelligentes permettant de commander l'implant. "Nous allons pouvoir transformer ces travaux de recherche en de véritables traitements dont pourront bénéficier des milliers de personnes de par le monde", promet-il. Reste à multiplier les essais pour accumuler les données scientifiques qui permettront aux agences de santé d'autoriser un jour ce traitement. A ce jour, les candidats sont nombreux à contacter les équipes dans l'espoir de remarcher, mais peu d'entre eux encore peuvent prétendre remplir les critères d'inclusions aux études. Source : https://www.sciencesetavenir.fr/sante/os-et-muscles/un-nouvel-implant-fait-remarcher-trois-paraplegiques-en-moins-d-un-mois_161225#xtor=EPR-1