LA VIE QUOTIDIENNE > Exprimez-vous !
combien de temps pour réapprendre à vivre ??
gnafron24:
Karine,
Le problème pour nous, enfin pas tous, tant mieux, c’est qu’on ne se considère justement plus « mec »…
(ton post de réponse à Mak : http://alarme.asso.fr/forum/index.php/topic,4309.msg30287/topicseen.html#msg30287)
On a grandi, s’est construit, bourré à la testostérone, fier de notre corps de « mec » et de notre « virilité », on a noué des relations basées sur notre entité (valeurs morales ET physiques) et puis tout s’effondre…
On redevient le bébé qu’on avait oublié - grosso-modo l’image est à peu près celle là - bébé avec un esprit d’adulte qui a vécu et qui sait parfaitement tout ce qu’il a perdu.
Je sais qu’on pourra dire que lorsqu’on est en couple et que l’on a des enfants c’est très égoïste de penser à tout laisser tomber…
Je suis un peu dans ce cas, même si j’essaie de faire « bonne figure ».
Se flinguer, on y pense, moi aujourd’hui j’en suis juste arrivé à me foutre de disparaître demain…
Juste pour dire : J’ai eu un soucis de santé il y a 2 ans, avec un pronostic pas très reluisant…
Mes proches ont pris pour du « courage » un désintéressement total de la chose.
Je m’en foutais et ne souhaitais juste pas trop souffrir si jamais…
Lorsqu’on devient spectateur de la vie de sa famille et juste bon à conseiller, puisque incapable de participer (c’est horriblement frustrant de vouloir aider, éduquer, montrer quelque chose à ses enfants lorsqu’on ne peut le faire soi même… la pédagogie verbale a ses limites), on pète les plombs…
Et on se remet inévitablement en cause :
À quoi je sers ?…
Dans la balance il y a : ma présence, mon moi profond (toujours là) et de l’autre côté, tout ce qui a disparu et toutes les contraintes nouvelles…
Elles pèsent beaucoup…
Pas facile de refaire l’équilibre…
Les enfants, qui ont cette particularité de moins dramatiser et de s’adapter (eux), aident à faire passer la pilule.
Se flinguer les priverait et leur laisserait une image négative de leur père ; c’est surtout à ça que j’ai pensé…
Reste que la mort, même si pas cherchée, est attendue sans crainte puisqu’elle sera, en quelque sorte, « libératrice ».
Bref, on ne vie plus tout à fait comme les autres, en général, je crois surtout qu’on « survie »…
Quant à la compagne dans tout ça…
Plus facile, je pense moi aussi (bien que ça reste un blocage que j’ai du mal à dépasser) de refaire sa vie lorsqu’on la croise « après ».
Le problème est posé, l’handicap est là, l’intérêt qu’elle nous porte est donc réel puisque le fauteuil ne semble pas lui poser de problème et son apparition est un grand plus qui nous booste à revivre puisque enfin notre vie retrouve un sens…
Mais lorsque la relation était antérieure, beaucoup de choses changent…
Le « mec » (avec tout ce que ça sous entend au niveau de sa virilité) et le « battant » (capable de construire, se défendre) sont out.
Il y a donc forcément un passage à vide pour essayer de repartir au mieux sur de nouvelles données… plus limitées.
Que ceux qui ont fait le grand saut de valide à handicapé sans problème me jette la première pierre, comme on dit !
J’ai cru comprendre, moi aussi, que vous, les femmes compagnes, ne voyiez pas comme insurmontable cette somme de problème… pour vous, l’être aimé est toujours là, même si plus fragile (votre instinct maternel, peut-être)…
Vous voilà même avec de nouvelles responsabilités, un nouveau sens à votre vie, une nouvelle façon de prouver votre amour…
Oui, mais…
Nous, nous ne voyons que la merde dans laquelle nous sommes et le fait, non négligeable, qu’on ne pourra plus assurer notre rôle « d’étalon » (que l’on pense indispensable à votre plaisir… et surtout au notre ! n’oublions pas que le handicap nous prive aussi du seul plaisir gratuit offert par la nature…) voire de géniteur…
Encore une fois, avec un recul que j’ai pourtant du mal à prendre, c’est égoïste, peut-être…
Alors comment faire ?… ben… au mieux.
Pas de remède miracle.
Soit proche, mais pas trop (c’est démoralisant de se sentir trop assisté, c’est un rappel de notre incapacité), soit surtout patiente (saute d’humeur, colère, dépression, notre lot quotidien ou presque) et puis essayez de sortir… tous les deux en amoureux et pour voir d’autres personnes, des amis… en société, on oubli pour un temps nos problèmes.
Dis-toi que c’est un cap à passer (un cap Horn !)… mais c’est jouable…
Et ton rôle sera important…
Voilà mon humble avis sur la situation et ma réponse à tes interrogations concernant le temps nécessaire pour réapprendre à vivre …
Surtout :
Cou-rage et surtout pas « Oh désespoir ! »
JP :|
arididi:
moi au bout de 8 ans en fauteuil il m'arrive encore de faire une petite cure d'antidepresseur.
je sais quand je dois les prendre (quand je deviens invivable pour mon entourage et pour moi même quand moralement ça suit plus) et quand je dois les arreter .
mon médecin reeducateur me fait confiance là-dessus.
Mes cures vont de quelques mois à 1 peu plus d'un an .ça depend des saisons ,des problémes de la vie courante , des evenements exterieurs .
C'est une aide ,ça rend la vie plus confortable pour moi et surtout pour mon entourage (ils ne sont pour rien dans mon handicap)
Surtout qu'il ne pense pas que ses enfants s"en remettront c'est pas vrai !!!
il a son role à jouer: son role de papa!!!
bonne journee à tous
ariane
TDelrieu:
--- Citer ---...et ne prend plus depuis longtemps d'antidépresseurs
--- Fin de citation ---
Karine,
Pourquoi ne prend-il plus les antidépressseurs qu'on lui a prescrit au CRF ?
Moi, j'avais fait ça aussi, j'avais arrêté ces médicaments en rentrant à domicile, en me disant un truc du genre "j'suis costaud moi, pas besoin de leur médoc pour dépressifs". En fait, bien mal m'en a pris, car dans les semaines qui ont suivi des douleurs neurologiques sont apparues (brûlures intenses dans l'aine et les pieds), puis tout d'un coup alors que j'allais bien jusque-là, mon moral a fait une chute libre, sans parachute... J'étais chez mes parents (j'avais 17 ans) et ils s'en sont pris plein la gueule, agressivité, idées noires, j'en voulais au monde et à eux d'être paralysé, etc...
Alors bien sûr, je ne sais pas si j'avais continué à prendre les antidépresseurs je n'aurais pas eu des épisodes difficiles, mais je pense tout de même que dans les premières années de la paralysie, le temps de "réapprendre à vivre" - qui peut prendre 3 ou 4 ans pour un paraplégique - il vaudrait mieux ne pas arrêter ces médicaments censés apporter une aide au début.
Après, c'est clair que sur le long terme, ce n'est pas la solution. Et beaucoup de choses peuvent agir sur le moral... De toute façon la paralysie est difficile a gérer, et c'est un combat quotidien. Encore faut-il vouloir le mener ce combat !
kavi69:
Bonsoir,
Combien de temps avez vous mis pour tolérer ( je ne dis pas accepter) ce fauteuil et son cortège de contraintes ?
Jérôme va très mal, il ne se bat pas , ne veut plus se battre. Je ne sais pas s'il a même essayé, c'est peut être dur ce que je dis mais c'est ainsi.
Il surprenait même les médecins dans le CRF car il avait appris a se sonder très (trop) rapidement, ils trouvaient même que c'était trop beau (je crois que c'est vrai)
Maintenant il ne pense qu'à une seule chose... en finir. Il regrette d'avoir été sauvé à l'hôpital, il ne veut plus se battre même pour ses enfants, pour lui ils s'en remettront, il veut juste une chose : se tirer une balle dans la tête. J'ai beau lui dire que la médecine bouge, rien n'y fait . Il est agressif, replié sur lui même, n'a plus goût à rien. Il ne veut consulter pas un psy sauf s'il est en fauteuil et ne prend plus depuis longtemps d'antidépresseurs. Pour lui notre couple est voué à l'échec.
De mon côté je ne sais plus quoi faire, que dire, je suis à court d'arguments. Je tiens le choc moralement depuis bientôt plus d'un an. Je tiens le coup grâce et pour mes enfants, mais je ne compte sur personne vraiment pour m'aider moralement, car je ne veux pas ennuyer les autres avec mes problèmes qu'ils ne peuvent pas comprendre (le malheur fait fuir). De plus je sens bien qu'il ne faut pas que je m'attarde car maintenant que Jérôme est rentré à la maison tout est rentré dans l'ordre....
Face aux autres on fait bonne figure, on trouve même que Jérôme à une meilleure mine. Alors qu'une fois la porte de l'appart' refermée c'est une autre histoire.
Je pense que vous avez du connaitre (ou même connaitre encore) cette situation.
Est ce qu'un jour on se sent plus serein face à ce choc ?
Désolée, je suis normalement plus joyeuse. Mais les enfants sont couchés alors je peux tomber le masque.
Karine
Navigation
[*] Page précédente
Utiliser la version classique