Ces chercheurs viennent à nouveau de créer l'événement à l'assemblée annuelle de la société américaine de neuroscience, mi-octobre, en annonçant qu'un patient en stade avancé de sclérose latérale amyotrophique, incapable de parler et de se mouvoir, pouvait lui aussi bénéficier du système "Braingate" - littéralement, "porte du cerveau". Tout comme une troisième patiente, paralysée après une attaque cérébrale, qui a pu diriger par la pensée, "de façon encore imparfaite", reconnaît M. Donoghue, une chaise roulante électrique.
Toutes ces prouesses ont été rendues possibles par l'introduction dans le cortex des patients d'un composant hérissé d'une centaine d'électrodes. Celui-ci transmet à l'ordinateur auquel il est relié une série d'impulsions électriques. Correctement interprétées par un logiciel, celles-ci peuvent induire la commande voulue.
Trois patients sont actuellement équipés de la Braingate. Les tests en cours visent à s'assurer que le matériel est fiable. Il nécessite le "branchement" du patient et un calibrage du signal chaque fois qu'il est utilisé.
"Nous travaillons à sa miniaturisation et cherchons des systèmes sans fil", indique M. Donoghue. D'ici cinq ans, celui-ci espère "réparer" le système nerveux en reliant le cerveau des patients non seulement à un ordinateur, sorte d'interface universelle, mais aussi à leurs muscles, pour commander des mouvements simples du bras ou de la main.
A plus long terme, il envisage de multiplier les implants intracérébraux, dans les zones du cortex commandant le mouvement de chaque membre. "Sans parler de marcher, permettre à une personne paralysée de se lever serait un grand progrès", assure-t-il.
La Braingate, développée conjointement par son laboratoire et par la société Cyberkinetics dont il est le fondateur, n'est pas seulement une interface susceptible de ressusciter le mouvement. "C'est aussi une fenêtre sur le cerveau", dit-il, qui pourrait aider à traiter certaines affections. "Imaginez un implant capable de détecter les signes avant-coureurs d'une épilepsie, et de stimuler certains neurones pour empêcher la crise", avance John Donoghue. Ou, "plus spéculatif encore", admet-il, une puce capable de prévenir la dépression ou la schizophrénie.
Hervé Morin
Article paru dans l'édition du 05.11.06. journal le monde