Vers la réparation de la moelle épinière

[animate type= »bounceInLeft » duration= »7″ delay= »0.5″][label type= »info »]Le 12 mai 2014 [/label][/animate]

Peut-on réparer une moelle épinière endommagée ?

Oui, chez le rat, grâce à deux grandes pistes thérapeutiques. Ces récentes avancées apportent de nouveaux espoirs pour les patients paralysés.

Faire marcher des rats paralysés : la science sait désormais le faire. Depuis une dizaine d’années, de nombreuses pistes thérapeutiques sont en effet explorées pour réparer une moelle épinière lésée. Certaines d’entre elles sont même en cours d’essai chez l’homme. L’idée est de pouvoir un jour proposer une thérapie non seulement aux 1 500 nouveaux traumatisés par an mais aussi à des personnes ayant subi une lésion plus ancienne. Et elles sont nombreuses : environ 40 000 personnes souffrent d’une paralysie en France. Celle-ci touche les membres inférieurs paraplégie si leur traumatisme est situé au niveau du thorax ou des lombaires ; elle touche les quatre membres tétraplégie si la lésion est située au niveau des cervicales.

Ces conséquences dramatiques s’expliquent par le rôle clé joué par la moelle : elle fait partie, avec le cerveau, du système nerveux central. Elle reçoit des informations sensibles du monde extérieur et les transmet au cerveau, qui lui renvoie des messages moteurs. Ces messages sont ensuite transmis aux muscles, via des neurones dont le corps cellulaire se situe dans la moelle et dont le prolongement, appelé axone, se termine dans le muscle. Au sein de la moelle, la transmission des messages se fait au niveau des axones, dans la substance blanche, à la périphérie de la moelle. En revanche, le traitement des messages se fait lui au niveau des neurones médullaires, situés dans la substance grise au centre de la moelle. D’autres cellules, les cellules gliales, nourrissent et protègent les neurones qu’elles entourent.

Mais les neurones lésés de la moelle ne se régénèrent pas. Le Prix Nobel de médecine espagnol Santiago RamÓn Y Cajal, fondateur de la neurobiologie moderne, le constatait il y a un siècle : lorsque les prolongements des neurones sont sectionnés à la suite d’une lésion au niveau de la moelle épinière ou du cerveau des mammifères adultes, leurs corps cellulaires n’émettent pas de nouveaux prolongements. Les neurones finissent par mourir et ne sont pas remplacés. Mais depuis le début des années 1980, ce dogme est battu en brèche ! Samuel David et Albert Aguayo, du département de neurosciences de l’université McGill, à Montréal, ont alors réalisé des greffes de nerfs périphériques au niveau d’une moelle épinière lésée. Et surprise : certains prolongements des neurones de la moelle repoussaient sur plusieurs centimètres. Cette découverte a ouvert la porte à une recherche foisonnante et à deux grandes pistes thérapeutiques : la régénération qui vise à favoriser la repousse des neurones lésés et la greffe de neurones pour remplacer ceux détruits.

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[spoiler title= »Cicatrice  » icon= »arrow-circle-1″] La régénération des axones endommagés pourrait intervenir dans les jours suivant l’accident. En effet, à la suite d’une lésion de la moelle, les cellules gliales qui entourent les neurones réagissent en isolant la région lésée du reste du tissu nerveux pour les protéger. En quelques jours, cette réaction réparatrice produit une cicatrice. Or, celle-ci est une sorte de barrière infranchissable qui empêche toute repousse de neurones. Comment contourner cet obstacle ? Pour y parvenir, de nombreuses équipes étudient la nature de cette cicatrice et des protéines qui la composent.

Ainsi, au début des années 1990, le groupe de Martin Schwab de l’institut de recherche sur le cerveau à Zurich en Suisse a découvert une protéine, baptisée Nogo. Elle est présente au niveau de la gaine de myéline qui entoure les axones de la moelle. Cette protéine est produite par des cellules gliales d’un genre particulier, les oligodendrocytes. Elle inhibe toute repousse axonale. Comment ? En interagissant avec des récepteurs situés au niveau des axones. Pour bloquer l’effet de cette protéine inhibitrice, les chercheurs ont donc mis au point des anticorps spécifiques, dits anti-Nogo. En se fixant aux protéines Nogo, ces anticorps les empêchent d’interagir avec les récepteurs axonaux.

Chez l’animal, ce traitement s’est déjà montré prometteur. En effet, les anticorps anti-Nogo ont été injectés à des singes partiellement paralysés d’un côté du corps, à la suite d’une lésion limitée de la moelle. Grâce à ce traitement, les neurones lésés ont repoussé de plus d’un centimètre et ont recréé des connexions nerveuses. Les singes ont ainsi récupéré près de 80 % des mouvements de la main touchée. Les anticorps anti-Nogo sont en cours d’essai clinique de phase I * /IIb en Suisse. Cet essai, lancé en 2006 chez des patients souffrant de lésions médullaires graves datant de moins de quinze jours, a pour but de déterminer d’éventuels effets secondaires du traitement. »[/spoiler]

[spoiler title= »Une enzyme clé » icon= »arrow-circle-1″]D’autres protéines ayant un effet inhibiteur sur la régénération, les glycoprotéines riches en chondroïtine sulfate, sont la cible de l’équipe de James Fawcett, de l’université de Cambridge, en Angleterre. Ces protéines sont produites par certaines cellules gliales du tissu cicatriciel, les astrocytes, après une lésion de la moelle. Pour bloquer l’effet de ces protéines, James Fawcett a eu l’idée en 2002 d’utiliser une enzyme spécifique, la chondroïtinase. Capable de dégrader ces protéines, cette enzyme injectée à des rats paraplégiques a permis de faire repousser certains axones. Les rats se remettaient alors à marcher. Un résultat encourageant. Problème : cette enzyme présente une forte toxicité. Il est donc impossible de l’utiliser chez l’homme. Toutefois, ces travaux ont l’intérêt de pointer les astrocytes comme obstacle principal à la repousse.

En effet, les astrocytes sont l’élément essentiel de la cicatrice. Après une lésion, ils forment un grillage infranchissable pour les neurones en émettant autour d’eux de nombreux prolongements. Or, nous nous sommes aperçus avec mon équipe de l’Inserm de Montpellier que pour former ce grillage les astrocytes synthétisaient notamment deux protéines : la GFAP et la vimentine. Ces protéines sont les éléments essentiels du squelette cellulaire, constitué par de fins filaments qui donnent leur rigidité aux prolongements de l’astrocyte. D’où l’idée de bloquer leur synthèse pour empêcher la formation de la cicatrice.

C’est ce que nous avons fait en 2003 avec des souris transgéniques chez lesquelles les gènes responsables de la synthèse de ces protéines sont inactivés. Les résultats ont été spectaculaires : la paralysie d’une des pattes arrière, consécutive à la lésion de la moelle des souris, a disparu en quelques semaines. La cicatrice gliale ne s’est pas formée, les axones lésés ont donc pu repousser. L’enjeu était dès lors de trouver un moyen d’inactiver ces protéines de façon thérapeutique.[/spoiler]

[spoiler title= »Vecteurs viraux » icon= »arrow-circle-1″]La technique que nous avons alors choisie est une technique de thérapie génique fondée sur l’utilisation de molécules, nommées ARN interférents. Ces derniers interfèrent avec le processus de synthèse des protéines vimentine et GFAP. De plus, pour bloquer leur synthèse uniquement au sein des astrocytes, l’équipe de Jacques Mallet, de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, à Paris, a mis au point des vecteurs viraux. Il s’agit de virus rendus inoffensifs dans lesquels ont été insérés les ARN interférents. Ils ont été construits de telle sorte qu’ils ne peuvent apporter les ARN interférents qu’aux cellules ciblées : les astrocytes.

Testés in vitro en 2009, ces vecteurs viraux se sont montrés très efficaces : sur des astrocytes et des neurones en culture, le traitement par ces vecteurs a entraîné une repousse des axones significative. Nous les avons depuis utilisés pour traiter des souris paraplégiques. Des résultats comparables à ceux observés en 2003 avec les souris transgéniques viennent d’être obtenus. Reste maintenant à tester cette piste thérapeutique chez le porc. Si cet essai est concluant, un essai clinique pourrait être lancé d’ici deux ou trois ans.

En outre, pour favoriser la régénération des neurones, on peut aussi greffer au voisinage de la lésion des cellules gliales capables de stimuler la repousse des axones. Développée initialement par Mary Bunge de la faculté de médecine de Miami aux États-Unis, cette approche a été reprise récemment par l’équipe d’Alan Mackay-Sim de l’université de Brisbane, en Australie. Après avoir obtenu des résultats encourageants chez le rat paraplégique, l’équipe australienne a démarré un essai de phase I. Elle a greffé chez trois patients paraplégiques un type particulier de cellules gliales : les cellules engainantes du bulbe olfactif, prélevées dans la cavité nasale des patients. Ces cellules sont bien connues pour stimuler et guider la croissance des neurones. Dans le bulbe olfactif, elles aident les neurones olfactifs à se régénérer en permanence. Après deux ans, les trois patients traités n’ont pas montré d’effets secondaires. Cela dit, ils n’ont pas non plus montré d’amélioration de leur état. Mais leurs lésions étaient anciennes.

En effet, la régénération n’est pas possible pour les lésions anciennes ou stabilisées. Pour ces dernières, seules les greffes de neurones pourraient permettre de réparer la moelle. Cette piste thérapeutique vise à remplacer les neurones détruits ou endommagés. Elle peut intervenir jusqu’à plusieurs mois après les lésions. Les greffes de neurones ont été utilisées avec un certain succès dans la maladie de Parkinson. Pour réparer la moelle épinière, les neurones de choix sont ceux qui synthétisent de la sérotonine. Et pour cause, ce neurotransmetteur * , présent dans toute la moelle, joue un rôle essentiel dans le contrôle de la locomotion. »[/spoiler][/box]

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