Un simple neurone peut réactiver des muscles paralysés
PARIS - Une seule petite cellule du cerveau peut restaurer des mouvements volontaires de muscles paralysés, selon des chercheurs américains qui ont réussi cette expérience originale chez des singes.
Leurs résultats, publiés mercredi en ligne par la revue scientifique britannique Nature, pourraient à terme, au minimum dans quelques années ou plus, avoir des applications cliniques pour les paralysés par blessure de la moelle épinière ou par une attaque cérébrale, selon les chercheurs.
Les chercheurs ont démontré pour la première fois que les singes peuvent apprendre à utiliser, en quelques minutes, un système de connexion artificielle directe entre des cellules du cortex moteur, la zone du cerveau qui contrôle les mouvements volontaires et un membre paralysé temporairement par injection d'anesthésiques.
Le développement de ce système, du domaine de la recherche sur l'"interface cerveau-machine", qui a permis aux primates de se servir d'un seul neurone pour bouger des muscles de leur poignet, pourrait permettre de créer une "neuroprothèse relativement naturelle", selon les chercheurs.
Si un singe peut le faire, alors un homme devrait être capable de le faire et même mieux, a estimé Chet Moritz (université de Washington) au cours d'une conférence téléphonique.
"Pratiquement chaque neurone que nous avons testé peut être utilisé pour ce type de stimulation", a-t-il relevé.
Le cerveau humain contient quelque 100 milliards de neurones et l'étude montre leur étonnante capacité d'adaptation. Les chercheurs ont en effet découvert que la cellule nerveuse utilisée par les singes pouvait ne pas être une spécialiste de la commande des mouvements. Ce qui augmente considérablement le nombre de cellules susceptibles d'être réquisitionnées, selon eux.
Ils ont d'abord, à l'aide d'électrodes, enregistré l'activité électrique de neurones isolés dans le cortex moteur des singes alors que ces derniers bougeaient leur poignet.
Les macaques, une fois l'avant-bras paralysé, devaient réussir, en bougeant un curseur sur l'écran, à jouer à un jeu vidéo très simple auquel ils avaient été auparavant entraînés.
L'activité cérébrale qui aurait normalement entraîné un mouvement volontaire persiste, mais les instructions ne parviennent pas aux muscles immobilisés. Les chercheurs ont réussi à contourner l'obstacle.
Les électrodes implantées dans des cellules nerveuses étaient reliées à l'avant-bras et au poignet des primates via un circuit externe couplé à un ordinateur avec amplification des signaux provenant du ou des neurones activés.
Les animaux ont réussi à bouger leur poignet en apprenant à contrôler suffisamment la cellule nerveuse. L'activité des neurones déclenchée par la volonté par les singes a été transmise au système informatisé et traitée jusqu'à pouvoir déclencher en temps réel la stimulation musculaire. En affinant la méthode, des gestes plus complexes, nécessitant la synergie de 10 à 15 muscles, comme saisir une tasse de café, pourraient être obtenus à partir d'un seul neurone.
Mais il reste des obstacles à franchir avant de pouvoir tester cette nouvelle technique sur des humains. Il faudrait en particulier un système miniature totalement implantable pour éviter tout risque d'infections liées aux fils traversant la peau, selon les chercheurs.
(©AFP / 15 octobre 2008 19h01)
http://www.romandie.com/ats/news/081015170123.hcjuvkt0.asp