Lésions spinales et cicatrice gliale, comment réparer ?

[label type= »info »]MARS 2013[/label]

Attention !! Cette article est assez technique mais il reste néanmoins compréhensible Wink

Une des premières préoccupations de L’IRME depuis sa création a été l’étude des traumatismes  médullaires  et  des  difficiles  possibilités  de  réparation  post-lésionnelle après un accident. Devant de tels drames, on sait que le point le plus crucial est le niveau de la lésion ; plus il est haut, plus le patient sera atteint. La paralysie sera d’autant plus importante que la lésion est haut-située sur l’axe cérébro-spinal. Il est tout aussi évident qu’une lésion partielle verra des possibilités de récupération alors qu’une section complète tout de même plus rare, laisse peu d’espoirs de récupération. Nous voulons ici aborder un autre problème, celui de la lésion elle-même, de son état et surtout de son évolution temporelle en essayant d’en atténuer les effets.

L’IRME depuis des années, a suivi de près les travaux des équipes d’Alain Privat et Jacques Mallet qui ont apporté une meilleure connaissance de l’évolution spinale après traumatisme et sur les molécules intervenant dans la repousse axonale. On sait aujourd’hui que dès qu’un traumatisme a eu lieu, il se forme autour de la plaie ce que l’on appelle sans doute improprement, une « cicatrice gliale ».  Cette  formation  spontanée  pose  encore bien des problèmes. Elle a souvent été considérée comme une barrière à la repousse des neurones. Des travaux plus récents démontrent au contraire qu’elle permet une accélération des mécanismes régénérateurs. Nous allons ici en décrire toutes les caractéristiques et montrer les stratégies actuelles d’intervention.

 ➜ Le traumatisme et  ses conséquences

Dans les secondes, les minutes et les heures qui suivent  le  traumatisme,  se  produit  au  niveau  de la  partie  lésée  un  ensemble  de  réactions  biochimiques qui, si rien n’est fait, vont aggraver encore la lésion avec surtout une activation des récepteurs du  N-méthyl-D-aspartate  (NMDA)  par  les  acides aminés (glutamate) libérés en grande quantité, et une ouverture des canaux ioniques associés à ces récepteurs.

L’arrivée intracellulaire de calcium (Ca++) active les phospholipases et provoque une chaîne de réactions  qui  libère  des  radicaux  libres.  Ces  derniers sont  à  l’origine  d’une  péroxydation  lipidique  qui va détruire de nombreuses cellules au niveau des vaisseaux  sanguins  et  des  neurones  de  la  substance grise et des fibres de la substance blanche spinale. Le tissu nerveux manque d’oxygène avec des complications dues à une baisse de tension qui ne fait que le léser encore d’avantage. Cette période ne fait qu’aggraver la situation de départ. On  classe  ces  lésions  spinales  en  trois

types, la lésion primaire, la lésion secondaire et la lésion tertiaire

• La lésion médullaire primaire due au choc initial, comprend non seulement des destructions neuronales  mais  aussi  des  cellules  avoisinantes, les  astrocytes  et  les oligodendrocytes.  Il  peut  y avoir  des  compressions  ou  des  étirements  de  la substance nerveuse qui vont provoquer des effets physiopathologiques.  Des  lésions  des  vaisseaux sanguins induisent un syndrome clinique de transsection médullaire avec contusion, commotion ou « d’attrition neuronale » ce qui correspond à la dégénérescence des neurones présents qui ne sont plus utilisés.

• La lésion médullaire secondaire est grave car elle est liée à une extension radiale et longitudinale du lieu traumatisé. Au niveau des vaisseaux sanguins, une hémorragie peut entraîner des dommages de la moelle qui au départ n’était pas lésée. Un  phénomène  d’autodestruction  post-traumatique se met en place avec dissolution et mort cellulaire (une sorte de gangrène, une nécrose avec apoptose  des  neurones  et  des  cellules  gliales) par altération du métabolisme énergétique et des pompes des différents canaux ioniques.

• La  lésion  tertiaire  correspond  à  la  mise  en place de la cicatrice gliale avec ainsi fermeture de la plaie.

 ➜ La formation de la cicatrice gliale

Durant ces trois étapes, les processus de neurodé-générescence s’accompagnent d’une neuroinflam -mation conduisant progressivement à la formation d’une  cicatrice  gliale  majoritairement  constituée par des astrocytes et des cellules microgliales qui libèrent des composants matriciels, inhibiteurs de la croissance axonale. Les métalloprotéases matricielles (MMPs) et leurs inhibiteurs  endogènes  (TIMPs)  sont  également produits par ces cellules gliales (nous parlons plus loin de leur utilisation). Les blessures ont aussi un effet sur le système immunitaire. Mais l’action de ces  effets  est  encore  discutée.  Certains  pensent qu’il intervient comme un système de protection, d’autres au contraire croient à une action délétère et même néfaste.

 ➜ Bénéfique ou néfaste ?

De  nombreux  travaux  démontrent  que  l’activité immunitaire accélère l’endommagement des tissus et, est la cause de la première atteinte tissulaire. En fait, des données récentes font penser que son intervention est plus complexe et que ce système, s’il intervient de façon appropriée, peut être bénéfique. Certains  travaux  montrent  qu’elle  utilise  des macrophages et de la microglie causant la perte de tissus nerveux alors que d’autres montrent que ces cellules immunitaires induisent une nouvelle croissance  et  la  survie  de  neurones.  Il  est  cependant évident aujourd’hui que ces cellules immunitaires jouent un rôle crucial au cours des phénomènes lésionnels. Ainsi peut-on penser que le tissu cicatriciel  contrôle  temporairement  l’activité  immunitaire.  Cet  effet  a  été  confirmé  par  l’utilisation  de souris  transgéniques  qui  n’ont  pas  de  réaction  astrocytaire  post-lésionnelle ;  on  s’aperçoit  chez elles qu’au niveau d’un site de lésion, la formation cicatricielle  est  réduite,  l’infiltration  leucocytaire aussi et la dégénérescence neuronale, limitée.L’interaction  étroite  entre  le  système  nerveux  et immunitaire  est  importante  pour  la  neuroprotection et la plasticité axonale après une blessure. Il a été montré que l’interleukine1ß (IL-1ß) intervient comme un puissant inducteur de la pousse neuritique  dans  des  cultures  tissulaires.  Boato  et  al. 2013 ont montré qu’IL-1ß intervient dans la formation de la cicatrice gliale dans un modèle de souris (souris déficitaire (souris IL-1ßKO) chez lequel on  a  administré  un  recombinant  IL-1ß)  avec  une compression de la moelle spinale. À l’inverse de leur hypothèse, une analyse histologique a révélé un accroissement de la largeur de la lésion et une réduction du nombre de fibres cortico-spinales au dessous de la lésion après une application locale du recombinant IL-1ß. Au contraire, l’absence de IL-1ß chez des souris IL-1ßKO améliore significativement la réparation en comparant à l’effet chez une souris sauvage. L’histologie révèle une lésion de plus petite taille et un niveau beaucoup plus bas d’astrogliose dans la substance blanche. Ainsi IL-1ß  non  seulement  agit  sur  la  lésion  en  terme  de taille et d’activation gliale mais aussi sur la plasticité générale des axones du CNS après blessure.

 ➜ Un équilibre à trouver

Les  protéoglycanes  sulfates  à  chondroitines (CSPG) : il apparaît de plus en plus que les protéoglycanes sont des composants essentiels de la matrice extracellulaire qui interviennent à la suite d’une  blessure  avec  les  altérations  moléculaires au niveau des astrocytes et des oligodendrocytes. Les  composants  les  plus  importants  sont  produits par les cellules environnantes et forment la matrice extracellulaire (ECM) contenant ainsi une mixture de molécules qui facilitent ou empêchent la croissance neuritique. L’équilibre entre ces deux actions  opposées  déterminera  le  succès  ou  non de la régénération. Une des familles inhibitrices la plus importante, agissant à ce niveau, est celle des protéoglycanes  sulfates  à  chondroitine  (CSPG). Un  protéoglycane  est  la  combinaison  d’une  protéine  et  d’un  glycosaminoglycane.  L’association entre les deux types de chaîne s’effectue essentiellement dans l’appareil de Golgi, mais également au niveau du réticulum endoplasmique d’une cellule.  La  chondroïtine  est  un  constituant  essentiel du cartilage et elle est naturellement produite par l’organisme. Elle est aussi présente dans les os, la peau, la cornée et la membrane des artères. Elle contribue  à  la  formation  et  à  l’entretien  du  tissu cartilagineux. Le rôle de ce tissu est d’assurer la rétention de l’eau dans le cartilage et son élasticité, ainsi que la solidité et la souplesse des articulations. Le CSPG est fortement produit après un traumatisme et plusieurs études ont démontré son effet inhibiteur pour la pousse axonale.

➜ La structure de la cicatrice gliale :

La cicatrice gliale décrite comme étant composée principalement  d’astrocytes,  découle  de  la  mise en  jeu  de  la  réactivité  astrocytaire.  Elle  se  forme au niveau lésionnel et constitue une véritable barrière physique et biochimique à la régénération des axones  lésés.  Les  astrocytes,  partenaires  essentiels  des  neurones,  sont  profondément  modifiés tant  sur  le  plan  morphologique  que  biochimique après  un  traumatisme.  Ils  sont  alors  qualifiés  de « réactionnels ».  De  tels  astrocytes  représentent la population cellulaire la plus importante de cette structure. La  réaction  gliale  à  une  lésion,  provoque  la  prolifération  de  microglie  (cellules  inflammatoires résiduelles  du  SNC),  de  précurseurs  d’oligodendrocytes,  de  cellules  méningées,  d’astrocytes  et de cellules souches. La  plupart  de  ces  cellules  produisent  des  molécules  qui  empêchent  la  repousse  des  neurones. Les  oligodendrocytes  produisent  du  N1250,  une glycoprotéine associée à la myéline (MAG), de la ténascine -R… Des oligodendrocytes précurseurs produisent NG2 DSD-1/ phosphacan et versican, des astrocytes produisent de la ténascine, brevican et neurocan, et ils peuvent être stimulés pour produire  NG2,  les  cellules  méningées  produisent NG2  et  d’autres  proteoglycanes,  et  la  microglie activée produit des radicaux libres, l’oxyde nitrique et  des  dérivés  de  l’acide  arachidonique.  À  noter que  ces  cellules  NG2  ne  sont  pas  uniquement considérées comme étant inhibitrices de la pousse axonale.

Particulièrement,  les  débris  de  myéline  exposent ces  molécules  inhibitrices,  ce  qui  renforce  l’effet inhibiteur de l’environnement pour la pousse axonale. On peut citer les nombreux travaux mettant en évidence l’implication de la protéine Nogo qui partage avec MAG et une autre protéine de la myéline, OgM, le même type de récepteur au niveau de l’axone dont la signalisation aboutit à la rétraction des axones.Nombre de ces molécules participent à l’inhibition empêchant les axones de repousser. Les plaques démyélinisées  de  multiples  scléroses  sont  composées  essentiellement  d’astrocytes  cicatriciels et d’axones nus. L’étendue de l’astrocytose et de l’inhibition de la remyélinisation est inconnue mais on sait que les astrocytes inhibent la migration des précurseurs des oligodendrocytes et des cellules de Schwann. Les astrocytes subissent des changements structuraux  qui  se  distinguent  selon  leur  localisation par rapport au site et à la nature de la lésion. Dans la  moelle  épinière  lésée,  les  astrocytes  proches de  la  lésion  sont  qualifiés  d’anisomorphes  :  ils présentent une prolifération cellulaire, une hypertrophie et surtout une extension de leurs prolongements  de  manière  irrégulière,  qui  aboutit  à  la formation d’une cicatrice gliale. En revanche, les astrocytes  loin  de  la  lésion  sont  eux  considérés comme  isomorphes,  ils  se  caractérisent  par  une hypertrophie, un maintien de leur architecture. Ces  modifications  morphologiques  s’accompagnent  sur  le  plan  biochimique  d’une  perturbation  de  la  production  d’un  grand  nombre  de molécules telles que les facteurs neurotrophiques, les  protéines  d’adhésion,  les  protéines  liées  à  la matrice extracellulaire, les protéases, les cytokines (ensemble  de  substances  servant  de  messagers entre les cellules de notre organisme synthétisées par les lymphocytes ou les macrophages), sont un peu comme des hormones mais ont des actions plus  locales.  Elles  sont  impliquées  dans  l’immunité  avec  les  interleukines,  les  interférons  et  les facteurs de nécrose cellulaire mais aussi dans la croissance et la maturation des cellules sanguines. Par exemple, l’érythropoïétine, la célèbre Epo, est une cytokine.

Actuellement il existe toute  une série de moyens qui permettent d’espérer une guérison ou tout au moins une amélioration à la suite de ces lésions nerveuses

➜ La réaction du système nerveux : des mécanismes compliqués

La réactivité astrocytaire se produit en réponse à tous les types d’agressions du système nerveux, quelle que soit la région du système nerveux central. Ces observations impliquent l’existence d’une signalisation commune qui mène les astrocytes à leur état réactionnel. Pour l’heure, ces mécanismes sont loin d’être élucidés. Pour être exhaustif, il faut citer bien d’autres molécules qui interviennent au niveau de cette cicatrice gliale notamment les tenascines (tenascin-R, tenascin-C  and  tenascin-X).  Ces  tenascines  forment  un  complexe  glycoprotéique  de  6  chaînes polypeptidiques qui se lient à la fibronectine et au syndécan. Elles jouent un rôle dans le guidage des migrations cellulaires grâce à leurs capacités à stimuler ou à inhiber l’adhérence cellulaire. Un second groupe de molécules bifonctionnelles qui  à  la  fois  attire  et  repousse  les  axones  sont les  nétrines  (des  netrines-1  aux  netrines-3).  Ce sont de petites molécules (de guidage axonal) en relation  avec  la  laminine  (protéine  de  la  matrice extracellulaire et composante majeure de la lame basale).  La  dernière  famille  enfin,  qui  intervient, est  celle  des  sémaphorines.  Les  sémaphorines constituent un  groupe  de  protéines de signalisation initialement décrites dans le système nerveux central où elles participent à la croissance du cône axonal et au guidage des axones. Elles ont en fait des rôles pléiotropes dans de multiples organes et peuvent stimuler ou inhiber la même fonction selon des  récepteurs  qu’elles  activent.  Les  récepteurs des sémaphorines sont en particulier rencontrés à la surface des cellules endothéliales. Le  sauvetage  de  cellules  neuronales  peut  être obtenu  par  apport  de  facteurs  neurotrophiques (BDNF,  NT-3,4,5).  Une  association  de  différents facteurs trophiques est souvent nécessaire car les différentes  populations  neuronales  répondent  à différents facteurs.

 ➜ Un point sur les travaux

On  a  trop  longtemps  considéré  cette  cicatrice comme une contrainte à la repousse axonale ; en fait des travaux récents rapportés par. A. Rolls et coll. 2009 démontrent qu’à son niveau, la lésion induit la prolifération de progéniteurs neuronaux (élément différencié mais qui va encore se diviser) et de cellules souches. Les astrocytes et les CSPGs influenceraient les cellules progénitrices en assurant leur migration et leur évolution. Cette cicatrice est donc une structure bien vivante et essentielle à la récupération neuronale.

 ➜ Comment agir sur les lésions spinales ?

Une  récupération  fonctionnelle  est  possible lorsque le pourcentage de neurones survivants est suffisant  pour  permettre  de  réactiver  les  circuits neuronaux. Ceci nécessite de bloquer l’apoptose et la mort cellulaire, mais également de favoriser la survie neuronale en apportant des facteurs neurotrophiques. Actuellement il existe toute une série de moyens qui permettent d’espérer une guérison ou tout au moins une amélioration à la suite de ces lésions nerveuses (ou encore de réduire l’aggravation de la situation). Si certains sont encore expérimentaux d’autres sont applicables dès maintenant.

• Le rôle de la Vimentine et de la GFAP : soutenues financièrement par l’IRME, les équipes d’Alain Privat  et  de  Jacques  Mallet  ont  travaillé  sur  des souris  génétiquement  modifiées  ;  ils  ont  pu  établir que deux protéines sécrétées par les cellules gliales sont responsables de cette réaction cicatricielle. Il a été montré sur des souris transgéniques dépourvues  des  gènes,  permettant  la  fabrication de ces deux protéines, que si expérimentalement on a sectionné leur moelle épinière, non seulement ces souris n’ont pas formé de cicatrice, mais leur lésion a été réparée et elles ont récupéré leur capacité de mouvement. Pour confirmer ce résultat prometteur, des essais sont en cours chez le porc, un intermédiaire indispensable, avant l’application chez l’homme. L’IRME espère, à plus long terme, trouver  une  stratégie  thérapeutique  fondée  sur l’utilisation spécifique des protéines concernées. Le laboratoire de Royce Mohan a découvert que la molécule withaferine A se lie à la fois à la vimentine  et  la  GFAP  dans  une  poche  unique  lorsque ces protéines sont solubles, dans la forme tétramère.  La  withaferin  A  pourrait  être  à  la  base  de recherches dans le développement thérapeutique d’un médicament.

• Les  cellules  souches  neurales : ces  cellules persistent dans la moelle épinière adulte au niveau du  canal  épendymaire.  In  vitro,  elles  se  différencient en neurones et en cellules gliales. L’équipe d’Alain  Privat  a  travaillé  sur  la  compréhension des mécanismes d’auto-renouvellement, de différenciation de ces cellules in vitro, ainsi que leurs interactions cellulaires dans la niche épendymaire chez l’humain et la souris.

• L’action  sur  le  CPSG :  au  début  des  années 1990,  Jerry  Silver  et  son  équipe  de  la  « Case Western  University »  a  émis  l’hypothèse  que  la « cicatrice »  gliale  n’empêchait  pas  la  croissance axonale, mais le CSPG (chondroitin-6-sulfate protéoglycane).  On  sait  aujourd’hui  qu’une  enzyme bactérienne  spécifique  appelée  chondroitinase ABC décompose le CSPG et permet aux axones de se pousser à travers les « cicatrices » gliales. La Chondroitinase est maintenant l’une des thérapies régénératrices les plus prometteuses pour le cerveau et le cordon médullaire.

• Le rôle du système des métalloprotéases matricielles (MMPs) et leurs inhibiteurs endogènes (TIMPs) dans la formation de la cicatrice gliale : il a été possible de mettre en évidence une régulation différentielle de l’expression et de l’activité des MMPs en fonction du type cellulaire et de la localisation des cellules gliales au sein de la cicatrice. Les astrocytes et la microglie répondent différemment aux inhibiteurs de MMPs et MMP-2 semble jouer un rôle prépondérant dans la migration des astrocytes lors de la formation de la cicatrice gliale.

• Les  cellules  engainantes  olfactives  (OEG) : ces  cellules  qui  engainent  les  axones  des  neurones situés dans la cavité nasale possèdent des propriétés  neurotrophiques  tout  à  fait  exceptionnelles et de nouveaux neurones sont créés tous les jours. Lors de leur maturation, les neurones en voie de formation émettent un axone qui va rejoindre sa cible, le bulbe olfactif. Durant sa migration, l’axone est nourri et guidé par les cellules engainantes olfactives. Découvertes il y a quelques années, on a pensé qu’elles pourraient être utilisées dans bien des processus réparateurs. L’IRME avait à ce propos soutenu bien des projets d’équipes sur le sujet. Si on fait le bilan aujourd’hui, force est de constater que les effets ont été dans l’ensemble décevants, hormis  la  forte  récupération  respiratoire  obtenue aussi bien lors de transplantation aigüe (Polentes et al, 1984) que lors de transplantation post-traumatique (Stamegna et al, 2011).Le groupe de Brisbane (McKay-Sims) a transplanté des cellules d’OEG, cultivées du nez des patients et les a injecté dans le cordon médullaire de deux patients mais les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes.

• Le Riluzole démontre une activité protectrice puissante  au  niveau  du  système  nerveux : le Riluzole, qui bloque les canaux sodiques dépendants  du  voltage  et  diminue  ainsi  la  libération présynaptique  du  glutamate,  est  utile  comme médicament anticonvulsivant, anxiolytique et hypnotique,  dans  le  traitement  de  la  schizophrénie, dans le traitement des troubles du sommeil et de la dépression mais il est aussi le seul médicament qui agit  positivement  sur  l’évolution  de  la  sclérose latérale amyotrophique (SLA). Deux grandes études cliniques ont montré l’efficacité du Riluzole chez l’homme en prouvant qu’il ralentit l’évolution de cette pathologie. Des études expérimentales ont montré chez le rat que le Riluzole joue un rôle protecteur contre une atteinte  de  la  moelle  épinière.  Si  on  réalise  chez le rat une compression spinale, l’injection pendant 10 jours de Riluzole (2 mg kg-1) induit une nette amélioration qui permet à l’animal de récupérer et d’utiliser à nouveau sa moelle épinière, retrouvant un comportement moteur presque normal.

• Le rôle de la biologie moléculaire et le développement  de  nouvelles  thérapeutiques  avec de nombreuses nouvelles molécules : en analysant le transcriptome d’un nerf sciatique de souris après  une  dégénérescence  Wallérienne,  des  milliers  de  gènes  ont  pu  être  analysés,  exprimés  et comparés à ceux d’espèces intactes (n’ayant pas subi une lésion). 719 transcripts ont été caractérisés notablement, le Nmnat1, qui contient dans sa séquence le gène Wld S, est particulièrement développé, cinq fois plus que dans le nerf sciatique d’une souris intacte. On trouve ainsi un très grand nombre  de  gènes  qui  sont  spécifiques  de  différents processus de croissance axonale et de plasticité, des processus d’inflammation et d’immunité des facteurs de croissance/types cytokines et de leurs, et des cellules d’adhésion et de la matrice extracellulaire. Ces résultats vont permettre de comprendre comment  les  systèmes  nerveux  et  immunitaire vont interagir pour réguler la réparation des nerfs et identifier les molécules qui induisent ces réponses. On peut aujourd’hui identifier des gènes capables de promouvoir la régénérescence d’axones lésés ; des  travaux  effectués  à  l’aide  de  micropuces  à ADN  ont  récemment  permis  d’identifier  plusieurs molécules  qui,  bien  que  méconnues,  pourraient être en mesure de stimuler la régénération axonale dans le SNC lésé.

➜ De nombreuses pistes à approfondir

 Cet  exposé  est  naturellement  trop  schématique. Mais  il  montre  que,  même  si  on  est  encore loin de la guérison, il y a actuellement des pistes très intéressantes  et  prometteuses  sur  les  façons  de traiter le handicap. La plupart des travaux sont encore expérimentaux mais il est clair qu’on connaît beaucoup mieux les mécanismes moléculaires et cellulaires qui sous entendent les cascades des événements se produisant dès l’accident. On en est déjà à la recherche des gènes capables d’induire telle ou telle réaction. La science n’est pas assez rapide pour nous tous, mais ses avancées sont certaines. La thérapie qui pourrait apparaître bientôt devrait donc permettre idéalement la réduction de la perte de tissu nerveux au site de lésion puis la réalisation d’une régénération fonctionnelle des axones lésés. Ces axes de recherche sont primordiaux pour l’IRME.

Origine de l’article —> http://irme.org/